L’année 2022 a marqué la fin du 3e Plan national maladies rares (PNMR). L’occasion de revenir sur la mise en place de ce dispositif, fer de lance de la lutte contre les maladies rares.  

Une définition pour commencer. Une pathologie est dite rare lorsqu’elle affecte une personne sur 2 000. Aujourd’hui, on compte sept mille maladies identifiées comme telles. La France est bien sûr concernée : trois millions de personnes sont touchées, l’équivalent de 4.5% de la population hexagonale. À cela s’ajoute un enjeu pédiatrique majeur : la moitié des patients ont moins de cinq ans.

Les maladies rares ne sont finalement pas si rares. On comprend dès lors pourquoi les pouvoirs publics en France ont pris le problème à bras-le-corps au mitan des années 90, avec la mise en place « d’une organisation adaptée de la prise en charge », selon le ministère des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes Handicapées. Une politique volontariste résumée en quatre lettres : P-N-M-R. 

 

Maladies rares, une définition américaine

La France est le premier pays européen à mettre en œuvre un programme de ce type… mais pas le premier mondial.  

Pour trouver l’origine de l’expression « maladies rares », il faut remonter aux années 70 et traverser l’Atlantique. Les rare diseases désignaient aux États-Unis les maladies « peu fréquentes » avant que les autorités américaines ne leur donnent un cadre légal en 1983 : l’Orphan Drug Act. Un texte adopté sous l’impulsion de la première coalition d’associations de patients ayant une maladie rare, la National Organization for Rare Disorders (NORD).  

L’Orphan Drug Act livre précisément une définition des médicaments orphelins qui s’articule en deux points. Une première « couche » est posée en 1983 : les médicaments orphelins sont considérés comme non rentables car soignant des maladies peu fréquentes 

Une seconde version de la loi apporte une nouvelle couche : sont également considérées comme rares les maladies affectant moins de 200 000 personnes 

 

La mise en œuvre de plans stratégiques en France

En France, associations et industriels s’intéressent aux médicaments orphelins dans les années 90. Ils poussent les autorités à plancher sur une transposition de la loi américaine dans les droits français et européen. 

Simone Veil lançait ainsi en 1995 la mission des médicaments orphelins. L’équivalent européen du NORD (l’European Organization for Rare Disorders, ou EURORDIS) est, lui, créé en 1997, suivi de l’adoption en 1999 du Règlement européen sur les médicaments orphelins sous l’impulsion des autorités françaises. 

Dans l’Hexagone, une étape supplémentaire est franchie en 2003, avec la mise en place d’un plan stratégique pour améliorer la prise en charge des personnes atteintes de maladies rares. Le 1er PNMR voit ainsi le jour, couvrant la période 2005-2008. Il sera suivi des 2e et 3e plans, respectivement sur les périodes 2011-2014 et 2018-2022.  

 

Quelles actions prévues dans les plans ?

En quoi consistent les PNMR ? Selon le ministère de la Santé, ils ont permis :  

La mobilisation de l’ensemble des acteurs du domaine des maladies rares et l’identification des centres de référence et de compétence. Les médicaments orphelins disponibles ont été rendus accessibles aux patients. L’information à destination des personnes malades, des professionnels et du grand public s’est développée grâce, notamment, au portailOrphanet (NDLR : une plateforme d’information consacrée aux maladies rares et aux médicaments orphelins). 

Ce travail d’information était inscrit dès le 1er PNMR (2005-2008), parmi dix axes stratégiques. Il prévoyait de « développer l’information pour les malades, les professionnels de santé et le grand public concernant les maladies rares ».

La recherche et l’identification des maladies rares, la formation des professionnels de santé, le dépistage, l’accès aux tests, l’accès aux soins ou le développement de partenariats à l’échelle nationale et européenne figurent parmi les autres axes de travail. 

Le 2e plan (2011-2014 initialement, prolongation jusqu’en 2016) s’inscrit dans la lignée du premier, avec la consolidation des axes stratégiques :   

  • ☑️ L'amélioration de la qualité de la prise en charge du patient ;
  • 🧪 Le développement de la recherche sur les maladies rares ; 
  • 🤝 L’amplification des coopérations européennes et internationales.  

Ces deux premiers plans ont permis des « avancées majeures » et fait de la France un « leader européen », tant en termes de soins que de recherche. Selon le ministère de la Santé, 

Le champ des maladies rares est un remarquable domaine où l’articulation entre l’organisation des soins, la production de connaissances et le retour vers le patient construisent un cercle vertueux. 

 

Des défis permanents à relever 

Dans ce cadre vertueux, une question se pose : pourquoi avoir amorcé un 3e plan national en 2018 ? Les réponses tiennent aux spécificités des pathologies rares. « Elles continuent de poser des problèmes particuliers, [notamment] en termes d’accès au diagnostic, avec une errance diagnostique encore beaucoup trop élevée ».  

Un autre défi concerne la recherche. En raison de leur caractère « rare », ces maladies exigent la constitution de bases de données nationales en interaction avec celles européennes.   

Des enjeux de taille, spécifiés dans les objectifs du 3e plan,  

  • 🩺 Assurer à chaque patient un diagnostic plus rapide, réduire l’errance diagnostique avec un objectif quantifié réduit à 1 an ;  
  • 📊 Renforcer la structuration des bases de données pour accroître le potentiel de recherche ; 

Le programme visait également à :  

  • 💪 Accroître le rôle des filières pour coordonner les actions des multiples acteurs concernés et accompagner certaines étapes clés, comme l’annonce du diagnostic ; 
  • 👓 Assurer un parcours plus lisible pour les personnes malades et leur entourage ;  
  • 💡  Encourager l’innovation et la rendre accessible ;  
  • 🔬 Mettre en place de nouveaux dépistages néonataux ;  
  • ⚙️ Conforter le rôle moteur de la France dans la dynamique européenne. 

Des objectifs déclinés en 55 dispositions elles-mêmes regroupées en 11 axes.  

 

Les biotech investies par les labos

Les autorités publiques ne sont pas les seules forces présentes sur le front des maladies rares. Les biotech sont considérées comme un secteur d’activité d’avenir, et les industriels l’ont bien compris.

L’actualité du secteur est dynamique et marquée par de récentes levées de fonds (par exemple, ici et ), le rachat de start-up biotechnologiques par des labos internationaux (britanniques , français…) ou des actions pour former les talents de demain

Les associations de patients ne sont pas en reste non plus. En juin 2022, s’est tenu le 3e Congrès de l’Alliance maladies rares, un collectif de 240 associations qui a défini 3 défis majeurs :   

  • 🩺 L'errance diagnostique, une problématique propre aux maladies rares. Il demeure en effet difficile pour les professionnels de santé de connaître les 7 000 pathologies recensées ; 
  • 💊 L’errance de traitement. Peu de données sont disponibles autour des maladies rares. Et seulement 5% des maladies disposent d’un traitement ; 
  • 👪 Les ruptures de parcours de vie. La transition enfant-adulte pour les patients peut être compliquée, avec par exemple des difficultés à trouver un médecin à l’âge adulte. 

Errance diagnostique, errance de traitement… Ces problématiques étaient déjà inscrites dans les PNMR. Le seront-elles dans un prochain plan, le quatrième ?