Le texte était attendu. Les autorités sanitaires chinoises viennent tout juste de publier leurs Bonnes Pratiques de Fabrication (BPF) cosmétiques. Des points d’achoppement demeurent néanmoins. L’Ifis vous livre une première analyse du texte.

Flashback. L’organisation ISO publiait en 2007 un document international : l’ISO 22716. Toujours d’actualité, le texte donne aux industriels cosmétiques les lignes directrices en vue de garantir la qualité de leurs produits, de la production jusqu’à leur expédition en passant par le contrôle et le stockage.

L’ISO 22716 peut être appliqué par tous les pays du globe, mais n’a pas pour autant une valeur contraignante. Il est par exemple obligatoire en Europe : l’Union européenne considère de ce fait qu’une entreprise qui respecte les « guidelines » du texte aura appliqué les Bonnes Pratiques de Fabrication. Mais il n’en va pas de même pour d’autres pays. Parmi lesquels, la Chine.

Des mesures claires…

L’Empire du Milieu aurait pu reprendre l’ISO 22716, mais les autorités sanitaires locales ont décidé de créer leur propre référentiel. Après plusieurs drafts, une version définitive a été publiée en février 2022. Et l’on peut déjà en tirer certains constats, le premier étant un durcissement des demandes qualité qui positionne ce référentiel à un niveau proche de ce qui est demandé pour les « cosmétiques OTC ».

Des dispositions du texte sont claires. Citons l’article 3 qui précise les « exigences générales » :

« Les entreprises doivent mettre en place un système de gestion de la qualité de la production afin d'assurer le contrôle et la traçabilité de l'ensemble du processus d'achat, de production, de test, de stockage, de vente et de rappel des produits cosmétiques, de manière à garantir une production continue et stable répondant aux exigences de qualité et de sécurité et à l'efficacité prédéterminée ».

Ou l’article 16 sur le système de gestion des documents.

« Les entreprises doivent établir et mettre en œuvre un système de gestion des documents, qui comprend la rédaction, la révision, l'examen, l'approbation, la délivrance et la destruction des documents. Les documents doivent être contrôlés afin de garantir que les documents utilisés sont des versions valides […].

… et d’autres qui posent question

En revanche, des ambiguïtés ou incertitudes demeurent sur plusieurs aspects. Prenons les entreprises qui doivent se conformer aux exigences du référentiel. Une version précédente précisait que seuls les fabricants étrangers qui produisaient en Chine étaient concernés par les BPF locales. Or, la version finale ne mentionne plus les fabricants « internes ».

Déduction est faite que les BPF chinoises concernent désormais :

  • Et les entreprises qui produisent en Chine
  • Et celles qui exportent vers le pays.

L’exportation pose du reste une inconnue : quid du certificat BPF actuel délivré par l’ANSM ? Pour vendre en Chine, le gendarme sanitaire délivre ce document sur la base des éléments transmis par les fabricants sur sa plateforme (dossier déclaratif avec preuves). Avec la publication des BPF chinoises, le certificat de l’ANSM continuera-t-il de s’appliquer ?

Une autre inconnue concerne les « exigences en matière de laboratoire ». L’article 22 indique que les industriels doivent disposer de leurs propres laboratoires de microbiologie. Or, toutes les entreprises ne les ont pas internalisés et doivent donc passer par des sous-traitants.

Ce « télescopage » entre les directives du texte et la réalité n’est pas seulement industriel. Il est aussi législatif. L’article 13 sur la « gestion de la santé des salariés » constitue un gros point d’interrogation. Le texte va plus loin que les exigences d’hygiène des BPF européennes : il exige la mise à disposition du dossier de santé de chaque collaborateur engagé dans une activité de production. Une mesure difficilement applicable en Europe. Secret médical oblige, ce type d’information ne peut être fourni à l’employeur en raison de son caractère intrusif et personnel.

Le Club Cosmétique 20 20 travaille sur le référentiel

Si la publication des BPF chinoises était attendue, des interrogations subsistent néanmoins quant à leur application en bonne et due forme par les entreprises cosmétiques, et pas uniquement sur les éléments mentionnés ci-dessus.

Le Club Cosmétique 20 20 repasse actuellement sur chaque article du référentiel afin de lever ces doutes et en livrer pour les industriels la meilleure interprétation possible.

Restez attentifs : formations et séminaires seront bientôt proposés afin de vous fournir les clés pour appréhender les enjeux du texte.

Philippe Devès et Philippe Lourenço