Émettre des « recommandations précises et concrètes », telle est la mission du groupe de travail lancé par la Commission nationale des recherches impliquant la personne humaine (CNRIPH).

Concrètement, le groupe aura pour objectif de faire évoluer le droit français et de l’adapter aux essais cliniques décentralisés, sur la base des recommandations publiées par la Commission européenne, l’Agence européenne du médicament (EMA) et le réseau des directeurs d’agences du médicament nationales (Heads of Medicine Agencies, HMA).

Ces recommandations publiées en décembre dernier s’inscrivent dans un plan européen visant à accélérer la réalisation d’essais cliniques au sein de l’Union européenne.

 

La Covid-19, le facteur accélérateur 

Les essais cliniques décentralisés ? Il s’agit d'opérations (soins, prélèvements, collecte de données) effectuées à distance du centre de recherche. Pierre-Henri Bertoye, président de la CNRIPH les décrit  au micro d’APMNews :

Plutôt que le patient ne se déplace à l’hôpital, on déplace les investigations vers le patient 

Ce type d’essai s’est développé durant la crise sanitaire, dans un contexte de confinements et d’engorgement des hôpitaux. La preuve par les chiffres : selon le Leem, les études hybrides (essais classiques ET essais décentralisés) représentaient entre 5% et 15% des essais menés avant la Covid, contre 30% et 50% aujourd’hui. Et la tendance ne devrait pas s'arrêter là. Les résultats d'une étude pilotée entre mars et mai 2022 par Medidata, éditeur de solutions cloud pour les essais cliniques, abondent en ce sens. 

Les raisons de cet essor sont évidentes. Les techniques décentralisées permettent notamment de lever les obstacles géographiques et d'optimiser le recueil de données en temps réel.

Des avantages qui font écho à ceux développés dans un livre blanc publié récemment par l’Association française des sociétés de recherche sous contrat (Afcros) sur les bonnes pratiques en matière de décentralisation hybride. Selon l’association, les essais cliniques décentralisés « constituent une pratique vertueuse pour tout le secteur de la santé ». Elles présentent un « intérêt accru » notamment pour :

  • Les patients fragiles ou ayant des difficultés à se déplacer ;
  • Un centre investigateur trop distant ;
  • Des visites régulières ;
  • Des actes et protocoles peu complexes ;
  • Un temps de suivi court.

Les essais décentralisés ne constituent pas toujours la panacée : ces techniques ne sont pas adaptées à certains actes, ainsi qu'aux patients en situation de fracture numérique. 

 

Plusieurs organisations consultées

Aujourd’hui, le cadre réglementaire français autorise les essais décentralisés, mais des adaptations doivent encore être menées. Certains éléments « seront à interpréter, d’autres à adapter si la modalité de décentralisation est considérée comme souhaitable, c’est-à-dire sans risque supplémentaire ».

En vue de ce travail de déclinaison, la CNRIPH a consulté les acteurs concernés, qu’ils soient institutionnels, industriels ou promoteurs hospitaliers. Parmi eux :

  • La Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) ;
  • La direction générale de la santé (DGS) ;
  • La direction générale de l'offre de soins (DGOS) ;
  • La délégation ministérielle au numérique en santé (DNS) ;
  • L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) ;
  • Le Leem ;
  • Le Syndicat national de l'industrie des technologies médicales (Snitem) ;
  • La fédération Unicancer ;
  • Le Comité national de coordination de la recherche (CNCR) ;
  • ou l'Association française des sociétés de recherche sous contrat (Afcros).

 

Un groupe de travail divisé en trois

La commission a également lancé un groupe de travail, lui-même scindé en trois sous-groupes.

À chaque groupe, sa thématique :

  • L’un va plancher sur les bonnes pratiques pour les essais décentralisés ;
  • L’autre sur la protection des données ;
  • Le troisième sur les outils et méthodes à disposition.

Début des travaux en janvier prochain pour des premiers retours au printemps prochain. Ces livrables incluront à la fois :

  • Des avis sur les dispositifs législatifs et réglementaires à « toiletter »
  • Des guides pratiques au plus près des solutions techniques. Plusieurs points seront abordés : le recrutement digital, la conduite de l’investigation sur les lieux, la téléconsultation, le télé-monitoring et la distribution et dispensation des produits.

Les futures recommandations nationales seront également enrichies de manière empirique. Les promoteurs pourront participer à une phase pilote en mettant en place des essais cliniques incluant des phases décentralisées. Ils pourront disposer d’un accompagnement dans le cadre de la réalisation de ces essais.

 

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